Nouvelles recommandations sur la prise en charge de l’hyperglycémie dans le diabète de type 2 : La Metformine d'abord
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Berlin, Allemagne -- L’analyse des données des études les plus récentes dans l’hyperglycémie du diabète de type 2 a conduit les experts de d’ADA (Américan Diabétes Association) et de l’EASD ( Association européenne pour l'étude du diabète) à proposer de nouvelles approches thérapeutiques individualisées en prenant en compte les facteurs de risques individuels. Dans la version définitive de ces nouvelles recommandations, en deuxième ligne – après la prescription de metformine et d’une modification du style de vie – les inhibiteurs du SGLT2 et les agonistes du GLP-1 trouvent toute leur place chez les diabétiques à haut risque cardiaque ou rénal. Ces nouvelles recommandations ont été présentées à l’occasion de l’EASD 2018 et elles font l’objet d’une publication simultanée dans Diabetologia et Diabetes Care [1,2,3].

En introduction à une session très riche, le Dr Chantal Matthieu (Louvain, Belgique) a expliqué « le patient doit être au centre de tout : il est essentiel de prendre en compte les caractéristiques générales du patient (mode de vie, comorbidité), l’impact du traitement sur la vie quotidienne et surtout de faire participer le patient à la mise en place d’un plan thérapeutique qui doit être adapté au fur et à mesure des évolutions de la vie du patient. C’est cette approche qui permet de prévenir les complications en optimisant la qualité de vie ».

Le patient doit être au centre de tout : cette approche permet de prévenir les complications en optimisant la qualité de vie Dr Chantal Matthieu

Des mesures hygiéno-diététiques

Un éclairage particulier est proposé sur des mesures hygiéno-diététiques à proposer à tous les patients : amélioration de la qualité de l’alimentation (régimes méditerranéen, DASH, pauvres en glucose, végétarien…), majoration de l’activité physique (jogging, marche, vélo en extérieur ou en salle, natation, yoga, tai chi…), restriction des apports énergétiques (programmes alimentaires, substituts…).

 

La place de la chirurgie bariatrique

Pour la première fois, la chirurgie bariatrique est proposée comme traitement d’appoint chez les adultes dont l’IMC est supérieur à 40 (37,5 pour les personnes d’origine asiatique) qui ne parviennent pas à perdre du poids de façon durable avec les mesures non-chirurgicales. Ce traitement permet d’augmenter le taux de rémissions du diabète, de diminuer le nombre des antidiabétiques prescrits, d’améliorer le métabolisme lipidique et de diminuer la pression artérielle.

La metformine avant tout

Le traitement de première intention repose sur la metformine dont l’efficacité est considérée comme importante avec un recul particulièrement long depuis la commercialisation. En outre, cette molécule est peu onéreuse et son utilisation ne s’accompagne pas de risque d’hypoglycémie.

La prescription d’un deuxième antidiabétique doit être guidée par l’atteinte de l’objectif d’HbA1c.

Pour le traitement de deuxième intention, le Dr Peter Rossing (Copenhague, Danemark) insiste sur l’intérêt de personnaliser le traitement en fonction des caractéristiques du patient et de ses comorbidités.

Deux catégories de patients ont été individualisées et divisées en sous-catégories : les diabétiques avec facteurs de risque cardio-vasculaire ou rénal associés et ceux, sans facteurs de risque.

Les patients avec facteur de risque cardio-vasculaire ou rénal

Si les facteurs de risque cardio-vasculaires prédominent

 

Les agents qui ont fait la preuve de leur efficacité sont l’I-SGLT2 empagliflozine (Jardiance®, Boehringer Ingelheim), d’après les résultats d’EMPA-REG OUTCOME) et le liraglutide (Victoza®, Novo Nordisk), d’après les résultats de l’essai LEADER. A noter, qu’au congrès EASD 2016, le sémaglutide (Ozempic®, Novo Nordisk) a également fait la preuve de son effet cardioprotecteur dans l’essai SUSTAIN 6 et qu’au congrès EASD 2018, l’albiglutide (analogue du glucagon like peptide 1, Eperzan®, GlaxoSmithKline) a également montré de bons résultats sur la prévention CV dans l’étude HARMONY.

 

Pour rappel, les gliflozines ne sont toujours pas commercialisées en France et parmi les agonistes de GLP-1, seul le liraglutide (Victoza®) est pour le moment disponible.

Si les facteurs de risque rénaux prédominent

 

Les anti-SGLT2 qui permettent de réduire l’incidence des insuffisances cardiaques et/ou la progression de l’insuffisance rénale chronique doivent être privilégiés si la fonction rénale le permet. Dans le cas où les anti-SGLT2 ne sont pas tolérés ou contre-indiqués ou si la fonction rénale est trop altérée, alors il est possible de prescrire un agoniste du GLP-1 dont l’effet préventif cardio-vasculaire a été prouvé par des études cliniques.

Chez les patients à risque CV ou rénaux qui ont atteint le niveau recommandé d’HbA1c et qui n’utilisent pas d’inhibiteur de SGLT2 ou d’agoniste du GLP-1 (alors que leur effet préventif sur le plan CV est prouvé)

 

Les recommandations offrent trois choix :

 

-si le patient reçoit déjà au moins deux traitements, considérer de changer l’un d’eux ;

 

-considérer d’abaisser encore le niveau d’HbA1c en introduisant un I-SGLT2 ou un agoniste de GLP-1 ;

 

-réévaluer l’HbA1c à trois mois d’intervalle et ajouter un I-SGLT2 ou un agoniste de GLP-1 si l’HbA1C augmente et dépasse le seuil recommandé.

 

Interrogé par Medscape édition française lors de la présentation de la première mouture des recommandations en juin dernier au congrès de l’ADA, le Pr Michel Marre (chef du service de diabétologie, endocrinologie, nutrition de l'hôpital Bichat-Claude Bernard, Paris) avait souligné que ces recommandations valorisant ces nouvelles molécules « étaient tout à fait justifiées » et qu’elles pourraient «  bénéficier aux patients diabétiques à haut risque cardiovasculaire qui se retrouvaient pénalisés ».

 

En l’absence de facteur de risque cardio-vasculaire ou rénal

S’il est souhaitable de minimiser le risque d’hypoglycémies, quatre familles médicamenteuses peuvent être prescrites (selon la disponibilité et le coût) : les inhibiteurs de la DPP4, les agonistes du GLP-1, les anti-SGLT2, si la fonction rénale le permet, et les glitazones.

 

Pour limiter la prise de poids ou chez les patients en surpoids, il est possible de prescrire des agonistes du GLP-1 ou des anti-SGLT2, là encore, si la fonction rénale le permet.

Enfin, lorsque la question du coût est au premier plan, les sulfamides hypoglycémiants et les glitazones sont le traitement de choix.

 

En l’absence de réponse à une bithérapie

L’intensification thérapeutique soit par remplacement de classe soit par des associations de trois antidiabétiques est envisagée dans tous les cas. Lorsque le recours à un traitement injectable est nécessaire, l’insuline basale n’est plus en première ligne : les experts recommandent l’utilisation des agonistes du GLP-1, si le coût de ce traitement peut être supporté par le patient ou les organismes de soins. Dans le cas contraire, l’insuline basale reste de mise.

Comme conclut le Dr Chantal Matthieu, « il est très complexe de faire la part des choses chez ces patients en raison de l’intrication des différents facteurs de risque. Néanmoins, la publication de ces recommandations devrait faciliter la mise en place de traitements personnalisés en accord avec les patients ».