Eléphantiasis
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Eléphantiasis

Publié par topclinique topclinique   | Il ya 6 ans   | 722

L'éléphantiasis se caractérise par des gonflements des membres, le plus souvent les jambes, et qui touche parfois aussi les parties génitales. C'est de cette particularité, donnant aux membres inférieurs de la personne touchée un aspect semblable aux pattes d'éléphant, que l'éléphantiasis tire son appellation. Cette pathologie peut avoir deux origines très différentes.  La plus fréquente est une maladie parasitaire, présente principalement en Afrique et en Asie : causée par un parasite d'aspect filiforme, elle est aussi appelée filariose lymphatique. L'autre forme, l'éléphantiasis nostras verrucosa, est un cas très exceptionnel lié à l'obstruction des vaisseaux lymphatiques.

L'éléphantiasis, qu'est-ce que c'est ?

Définition de l'éléphantiasis

L'éléphantiasis se caractérise par un gonflement tel des membres inférieurs que leur aspect ressemble à des pattes d'éléphant. Les traces les plus anciennes de cette pathologie qui ont été retrouvées remontent à plus de 2000 ans avant J.C. Ainsi, une statue du pharaon Mentuhotep II a été représentée avec une jambe enflée, soit une caractéristique de l'éléphantiasis, qui est de fait un symptôme d'une infection lourde aussi appelée filariose lymphatique. Cette maladie parasitaire, présente en Asie et en Afrique, est totalement absente d'Europe.

L'autre forme de l'éléphantiasis, dénommée Eléphantiasis nostra verrucosa, qui peut se retrouver en France, est due à l'obstruction des vaisseaux lymphatiques, en raison, ou non, d'une infection bactérienne. Elle demeure très exceptionnelle.

Causes de l'éléphantiasis

L'éléphantiasis est une caractéristique extrême de la filariose lymphatique : une maladie due à de petits parasites, ou filaires, qui logent dans le sang et les tissus humains, et se transmettent par les moustiques, leur vecteur. Ces vers sont, à 90 %, des Wuchereria bancrofti, les autres espèces étant surtout Brugia malayi et Brugia timori. Les larves sont des microfilaires, vivant dans le sang. Devenus adultes, ces parasites se retrouvent dans le système lymphatique, soit l'ensemble des structures et vaisseaux au rôle primordial dans le système immunitaire. Ces filaires résidant dans les vaisseaux lymphatiques les dilatent et les obstruent, entraînant l'enflement d'un ou plusieurs membres. Sont surtout concernés les vaisseaux lymphatiques de la partie inférieure du corps, par exemple au niveau de l'aine, des parties génitales et des cuisses.

Concernant l'éléphantiasis nostra verrucosa, donc non causé par le parasite, l'origine des lymphoedèmes est liée à une obstruction des vaisseaux lymphatiques, pouvant être d'origine bactérienne ou non. Le lymphoedème serait alors lié à un état chronique d'inflammation.

D'autres situations peuvent encore engendrer l'éléphantiasis : des maladies appelées leishmanioses, des infections répétées au streptocoque, elles peuvent aussi être des conséquences de l'ablation des ganglions (souvent dans le but de prévenir le développement d'un cancer), ou encore être liées à un défaut héréditaire de naissance.

Diagnostic

Il y a lieu de procéder à un diagnostic clinique en présence d'un membre inférieur enflé, ou encore si l'enflure est plus prononcée sur un membre que sur l'autre. La première étape diagnostique d'une filiarose lymphatique consiste à établir une histoire de l'exposition au parasite, dans les régions endémiques. Ensuite, des tests de laboratoire permettent de confirmer le diagnostic.

  • Ces tests sont basés sur la détection des anticorps.
  • Une biopsie de la peau peut également permettre d'identifier les microfilaires. 
  • Il existe aussi une méthode basée sur l'ultrasonographie, un type d'échographie vasculaire qui permet de localiser et visualiser les mouvements du parasite adulte.
  • Des techniques de détection comme les tests PCR permettent de mettre en évidence la présence de l'ADN du parasite, chez les humains comme chez les moustiques.
  • La lymphoscintigraphie, une technique d'exploration des vaisseaux lymphatiques, a montré que, même dans les stades précoces et cliniquement asymptomatiques, des anomalies lymphatiques pouvaient être détectées dans les poumons des personnes infectées.
  • Les tests immunochromatographiques sont hautement sensibles et spécifiques pour le diagnostic de l'infection par W. Bancrofti.

Concernant l'éléphantiasis nostras verrucosa, très rare, le diagnostic pourra notamment être posé par le phlébologue. Il s'identifie à sa clinique.

Les personnes concernées

  • 120 millions de personnes dans le monde sont affectées, dont 40 millions  souffrent de formes sévères avec des manifestations cliniques importantes des filarioses lymphatiques : lymphoedèmes, éléphantiasis et hydrocèle.
  • Cette maladie touche principalement les populations d'Afrique et d'Asie, et du Pacifique occidental. La pathologie est présente mais pas courante dans les Amériques et en méditerranée orientale, et elle est totalement absente d'Europe.
  • Les adultes, plus particulièrement entre 30 et 40 ans, sont davantage concernés que les enfants, car bien que cette maladie débute souvent pendant l'enfance, c'est chez l'adulte que la filariose devient importante, du fait de l'obstruction progressive des vaisseaux lymphatiques.
  • Les cas d'éléphantiasis en France peuvent être des effets secondaires suite à l'ablation des ganglions lymphatiques, consécutifs par exemple à un cancer.

Les facteurs de risque

La transmission du parasite dans la communauté a un risque augmenté si les conditions d'hygiène sont mauvaises.

Les symptômes de l'éléphantiasis

Le symptôme le plus caractéristique de l'éléphantiasis est l'enflure, unilatérale ou bilatérale, des membres inférieurs. Ces enflures sont molles et réductibles aux premiers stades, mais deviennent indurées, soit fermes au toucher, lorsqu'il s'agit de lésions anciennes.

Chez les patients de sexe masculin, la filiariose lymphatique pourra aussi se manifester par une enflure du scrotum ou hydrocele (sac empli de fluide au niveau du scrotum). Chez la femme, il peut y avoir enflure de la vulve, non sensible sauf en cas d'accès aigu.

Il peut également y avoir des suintements, qui sont malodorants.

Autres symptômes au cours de la phase aigue

  • Fièvre.
  • Douleurs dans le membre infecté.
  • Traces rouges et sensibles.
  • Malaises.

Les symptômes de l'éléphantiasis nostras verrucosa sont proches, avec toujours la présence d'un membre du corps enflé, ils sont en outre caractérisés aussi par des verrues au niveau de la peau.

Traitements de l'éléphantiasis

Plusieurs types de thérapies existent pour le soin de l'éléphantiasis lié aux parasites :

  • Traitements médicamenteux : ivermectin et suramin, mebendazole et flubendazole, ou encore le diethylcarmazine, et l'albendazole.
  • Traitements chirurgicaux : l'hydrocele peut se traiter par des procédures chirurgicales, comme l'excision. Un membre infecté peut également être soigné de façon chirurgicale, par des procédés de drainage ou d'excision.
  • Traitement thermique : les Chinois ont testé avec succès une nouvelle méthode dans le traitement du lymphoedème, qui alterne chaud et froid.
  • Phytothérapie : plusieurs herbes sont prescrites depuis des siècles dans le traitement de l'éléphantiasis : Vitex negundo L. (racines), Butea monosperma L. (racines et feuilles), Ricinus communis L. (feuilles), Aegle marmelos (feuilles), Canthium mannii (rubiacées), Boerhaavia diffusa L. (plante entière).

Plusieurs stratégies sont mises en place pour traiter l'éléphantiasis de cause non parasitaire, qui reste encore très difficile à soigner :

  • Massages, bandages, compression.
  • Hygiène de la peau.
  • Retrait du tissu par débridement chirurgical.
  • Laser de dioxyde de carbone ablatif, une nouvelle technique testée récemment avec succès.

Prévenir l'éléphantiasis

La prévention médicamenteuse de la filariose

De vastes programmes d'administration massive de médicaments, durant les treize dernières années, ont permis, selon l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), de prévenir ou guérir plus de 96 millions de cas. Eliminer cette filariose lymphatique est possible par l'interruption du cycle de transmission du parasite.

  • De fait, fournir un traitement à large échelle à des communautés entières où l'infection par le parasite est présente peut permettre de stopper l'étendue de l'infection. Cette stratégie, qui est une thérapie médicamenteuse préventive, consiste à donner annuellement une dose combinée de deux médicaments, à des populations à risque.
  • Ainsi, l'albendazole (400 mg) est donné de façon concomitante avec l'invermectine (150 à 200 mg/kg) ou avec du diethylcarbamazine citrate (6 mg/kg). Ces médicaments, aux effets limités sur les parasites adultes, réduisent effectivement le nombre de microfilaires de la circulation sanguine, soit les larves des parasites. Ils préviennent l'étendue et le développement vers les moustiques. Les formes adultes du parasite peuvent, quant à elles, rester vivantes pendant des années.
  • Dans les pays où un autre parasite, appelé Loa loa, est présent, cette stratégie préventive devrait même être donnée de façon préférable deux fois par an.

L'Egypte est le premier pays au monde à avoir annoncé l'éradication complète de la filariose lymphatique, toujours selon l'OMS.

Le contrôle des moustiques vecteurs

Le contrôle du vecteur de la maladie, le moustique, peut augmenter les efforts d'élimination, en réduisant la densité de moustiques, et en prévenant le contact entre humains et moustiques. Les interventions de contrôle de la malaria, par aérosols et insecticides, ont des effets bénéfiques collatéraux en réduisant également la transmission de filariose lymphatique.

Prévention de l'éléphantiasis nostras verrucosa

En matière d'éléphantiasis non lié au parasite, il faut noter, de façon générale, la prévention contre l'obésité, qui est l'un des facteurs de risque.

En conclusion

C'est depuis 1997 qu'ont été initiées toutes ces étapes vers l'élimination de la filariose lymphatique comme problème majeur de santé publique. Et en 2000, l'OMS a lancé le programme global de cette éradication, avec deux composantes :

  • stopper l'étendue de l'infection (en interrompant la transmission).
  • soulager les souffrances des populations affectées (en contrôlant la morbidité), au moyen d'un protocole de soins, parmi lesquels la chirurgie, une bonne hygiène et des soins cutanés, afin d'éviter une surinfection bactérienne.

Rédaction : Agnès Bourahla-Farine, Journaliste scientifique

Novembre 2018

Références

  • www.who.int
  • A review of neglected tropical diseases : filariasis. A.Chandy et al, in Asian Pacific Journal of Tropical Médicine, 2011.
  • Elephantiasis Nostras Verrucosa. R. Fredman et M. Tenenhaus, in Division of Plastic and Reconstructive Surgery, 2012.
  • Comment reconnaître les maladies tropicales négligées selon les altérations de la peau (document OMS).
  • Elephantiasis nostras verrucosa successfully treated by surgical debridment. F. Iwao et al, in Dermatology Surgery, 2004.
  • The successful treatment of Elephantiasis Nostras Verrucosa with Laser Ablativ carbon dioxid. C. G. Robinson, in Journal of cutaneous Médicine, 2018.