Coronavirus : la Chine ment-elle sur les chiffres officiels des victimes ?
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Alors que la Chine prône sa transparence sur la gestion de l’épidémie de coronavirus, plusieurs lanceurs d’alerte estiment qu’elle minimiserait le nombre réel de cas - et de morts - dans le pays.

Coronavirus : la Chine ment-elle sur les chiffres officiels des victimes ?

Le Parti Communiste de Chine ne serait-il pas complètement transparent sur le nombre de victimes du coronavirus 2019-nCoV ? C’est en tout cas ce que suggèrent certains spécialistes, de même qu’une partie de la population chinoise qui brave la censure pour prendre la parole sur les réseaux sociaux.

Une activité 4 à 5 fois supérieure à la normale dans les crématoriums

Selon des chiffres relayés sur le blog Mish Talk, l’activité des crématoriums à Wuhan serait 4 à 5 fois supérieure à la normale. En se basant sur ces informations, Guo Wengui, milliardaire chinois exilé aux États-Unis, estime que 50 000 décès serait imputable au coronavirus rien que dans cette ville, et le nombre de cas dans le pays s’élèverait à 1,5 million.

Il explique en effet que Wuhan comporte 49 crématoriums et que, selon ses sources, ces derniers fonctionnent sans interruption depuis plus de deux semaines. Des propos qui concordent avec ceux d’un employé de crématorium interviewé la semaine dernière par des journalistes, qui avait déclaré que lui et ses collègues travaillaient 24 heures sur 24.

La cause du décès serait rarement mentionnée sur les certificats

Pourtant, malgré cette hausse incroyable du nombre de décès, très peu de victimes sont officiellement identifiées comme mortes du coronavirus. Dans un article de China Press sur l’épuisement professionnel des employés de crématoriums depuis le début de l’année, l’un deux a déclaré : “j’ai reçu 127 corps hier et j’en ai brûlé 116. Parmi eux, seulement 8 mentionnaient une contamination au coronavirus sur leur certificat de décès, et 48, une possible contamination”.

Ce même article rappelle que, selon les directives du gouvernement, les crématoriums doivent donner la priorité aux personnes décédées du coronavirus. Les autres corps ne peuvent être brûlés le jour-même, notamment pour des raisons culturelles et religieuses. “En se basant là-dessus, on peut présumer que les 116 morts étaient tous morts de la pneumonie de Wuhan, ou au moins suspectés d’être contaminés”, soit au moins 90 % des corps amenés dans ce funérarium.

Au regard de ce qui est réellement écrit sur les certificats de décès, cela suggère une sous-déclaration massive des décès par coronavirus.

Chinese Goverment is hiding the truth about #coronavirus deaths and confirmed cases are way more then they say..
pic.twitter.com/iNLnvwNjb8

— Tommaso Scelzo (@TScelzo) February 8, 2020

 Des scientifiques estiment que le nombre de cas est sous-estimé

En parallèle, plusieurs scientifiques se sont aussi penchés sur le nombre de cas - réels et supposés. Ainsi, une étude de l’Université de Bâle, publiée le 7 février 2020 dans la revue Swiss Medical Weekly, estime que “les statistiques officielles sont probablement une sérieuse sous-estimation du réel total”. Les chercheurs précisent que “le délai entre le diagnostic et le décès / rétablissement et la proportion de sous-déclarations varient dans le temps, de même que d’une ville ou d’un pays à l’autre”. Mais pour eux, le taux de mortalité (le nombre de décès rapporté au nombre d’infections) serait plutôt inférieur à celui annoncé.

Ils considèrent, en effet, qu’en “se concentrant sur des milliers de cas graves, les formes légères ou asymptomatiques qui représentent peut-être la majeure partie des infections à 2019-nCoV pourraient rester largement méconnues, en particulier pendant la saison de la grippe". Ainsi, il y aurait bien plus de cas qu’on ne le pense, mais moins de morts au prorata des personnes infectées.

Des prédictions qui envisagent un pic de contaminations en février

D’autres scientifiques ont essayé de prédire le nombre de contaminations à venir dans le mois. Adam Kucharski, professeur associé d'épidémiologie des maladies infectieuses, de la London School of Hygiene & Tropical Medicine, estime ainsi qu’en “supposant que les tendances actuelles se poursuivent, nous prévoyons un pic de la mi-février à la fin février” à Wuhan. D’ici la fin du mois, au moins une personne sur vingt sera infectée - soit environ 500 000 habitants - rien que dans cette ville.

La négligence du gouvernement aurait contribué à la propagation du virus

Depuis le début de l’épidémie, la population chinoise brave parfois la censure pour tenter d’alerter la communauté internationale ; à l’image de ce jeune wuhanais qui a récemment posté une vidéo dans laquelle il dénonce la gestion de l’épidémie par le gouvernement. Il explique notamment qu’avant la mise en quarantaine de la ville, très peu d’habitants portaient des masques.

“Ce n’est que le 23, quand Wuhan a été mis en quarantaine, que nous avons enfin reçu des dépliants un peu partout, pour demander à tout le monde de porter un masque. Et là, nous avons finalement commencé à voir des gens portant des masques”. Il explique donc qu’aucun citoyen n’a refusé d’en porter, mais qu’il y a tout simplement eu un manque d’information de la part du gouvernement local, “qui n’a rien fait du tout”.

Les “cas suspects” sont renvoyés chez eux, d’après le lanceur d’alerte

“Pendant l’intégralité de la conférence de presse, pourquoi ne nous ont-ils pas exhortés à mettre immédiatement un masque ? Pour au moins accroître notre sensibilisation au problème de santé publique ?”, questionne-t-il. “Dans cette pandémie, même après l’expérience de 2003, nous répétons encore nos erreurs”.

Le jeune homme dénonce aussi le manque de ressources dans les hôpitaux locaux, qui sont “dans le chaos total”. Il aurait été informé par des amis soignants que les personnes suspectées d’être contaminées au coronavirus étaient tout simplement renvoyées chez elles avec des anti-inflammatoires et la consigne de s’isoler, par manque de moyens sur place. “Si vous êtes un super-contaminateur, cela ne signifie-t-il pas que le gouvernement, ou l’établissement médical, vient de vous dire de transporter le virus partout ? Et de contaminer tout le monde ?”, interroge-t-il encore. Un témoignage qui reste toutefois non-vérifié, et donc à prendre avec des pincettes...

43 800 cas et 1 100 décès selon le dernier bilan officiel

À l’heure où nous écrivons ces lignes, 43 838 personnes seraient infectées par le coronavirus en Chine, et 1 100 patients en seraient décédés, selon le dernier bilan officiel du gouvernement chinois. Des chiffres que nous ne sommes malheureusement pas en mesure de confirmer… Ni d’infirmer.