Ebola : un malade s'échappe et sème la panique sur un marché du Liberia
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ebolaLe Liberia, pays ou sévit actuellement l'épidémie de virus Ebola, s'apprête à recevoir les échantillons d'un sérum expérimental appelé ZMapp, qui a déjà été administré aux deux Américains contaminés par la maladie. De quoi s'agit-il ?

Alors que l'épidémie de virus Ebola vient de franchir la barre des 1.000 morts en Afrique de l'Ouest, c'est une décision importante qu'a prise la Maison Blanche et l'Agence américaine des médicaments (FDA). Suite à la demande de la présidente libérienne Ellen Johnson Sirleaf, les autorités des Etats-Unis ont accepté d'envoyer au Liberia des échantillons d'un sérum destiné à améliorer le traitement de la fièvre Ebola. Son nom : le ZMapp.

Si ce traitement n'a pas été évoqué plus tôt, c'est qu'il n'a encore jamais été testé sur l'homme. Fabriqué par la firme de biotechnologie Mapp Biopharmaceutical, le ZMapp n'a pour l'heure été expérimenté que chez des primates. Et s'il a montré des résultats prometteurs, on ignore son efficacité ou sa sûreté chez l'humain. Malgré cela, le sérum aurait déjà été administré à deux Américains, le médecin Kent Brantly et son assistante Nancy Writebol contaminés lors d'une mission pour l'organisation Samaritan's Purse au Liberia.

Selon des sources citées par CNN, les deux en particulier le médecin auraient montré une importante amélioration de leur état de santé après avoir pris le traitement. C'est pourquoi plusieurs Etats ont exprimé le souhait de pouvoir bénéficier eux aussi du sérum.

De quoi est composé le ZMapp ?

Le sérum est constitué d'anticorps monoclonaux, autrement dit des molécules fabriquées par le système immunitaire pour lutter spécifiquement contre une autre molécule étrangère. Dans le cas présent, ces anticorps ont été obtenus chez des souris après les avoir exposées à des particules de virus Ebola. Les molécules sont ainsi spécifiquement dirigées contre une protéine présente à la surface du virus.

D'après l'étude publiée en 2012, le ZMapp aurait été testé chez quatre macaques infectés qui auraient montré 100% de survie lorsque le sérum a été administré 24 heures après l'exposition au virus. Le taux de survie est tombé à 50%, avec une injection 48 heures après infection. En comparaison, un macaque infecté et non traité serait mort cinq jours après l'infection par Ebola. Une étude publiée un an plus tard a confirmé les résultats.

Selon celle-ci, les macaques qui ont survécu étaient toujours protégés 10 semaines après et ont résisté à une nouvelle exposition au virus. 13 semaines après, ce sont 4 animaux sur 6 qui ont survécu. Le cocktail d'anticorps est destiné à bloquer le virus et à aider le système immunitaire à l'éliminer. Mais bien que ces résultats soient prometteurs, ils ne signifient pas que le traitement peut être aussi efficace et sûr chez l'homme.

Aussi, entamer des essais cliniques demande une longue démarche et plusieurs étapes. Le but est de tester si le traitement n'a pas d'effets secondaires graves et ensuite d'évaluer son efficacité à lutter contre le virus Ebola. C'est pourquoi le ZMapp n'en est encore qu'à un stade expérimental.

Débat éthique

Face à tant d'incertitudes, l'utilisation d'un tel traitement approuvé par aucune autorité sanitaire suscite un débat éthique important. "Est-il éthique d'employer des médicaments non agréés, et si c'est le cas quels critères doit-on définir, dans quelles conditions doit-on administrer ce traitement et qui doit être traité ?", a indiqué à l'AFP Marie-Paule Kieny, assistante au Directeur général de l'Organisation mondiale de la santé (OMS).

Pour répondre à ces questions, l'OMS a organisé lundi une téléconférence entre experts. Celle-ci devait lui permettre de fixer une position à tenir face aux demandes de plus en plus nombreuses et pressantes d'utilisation du ZMapp. Néanmoins, des doses seraient d'ores et déjà en route vers l'Afrique de l'Ouest. Le problème est aussi que la société Mapp Biopharmaceutical ne dispose que de très petites quantités. Mais elle compterait essayer d'accélérer la production.

D'après CNN, le médecin Kent Brantly s'est vu administrer le sérum alors que son état s'était brusquement dégradé. Il commençait à montrer des difficultés à respirer quand il a demandé aux docteurs de lui injecter le traitement. "En l'espace d'une heure, l'état de Brantly s'est grandement amélioré. Il a commencé à mieux respirer, l'éruption sur son buste a disparu. L'un de ses médecins a décrit l'évènement comme 'miraculeux'", raconte CNN.

Le matin suivant, Brantly était à nouveau capable de prendre sa douche seule avant de partir prendre l'avion pour être rapatrié vers les États-Unis. Writebol elle, aurait montré une amélioration mais moins significative, ce qui aurait poussé les médecins à lui donner une seconde dose avant de la ramener sur le sol américain.

Une balance bénéfice/risque incertaine

Pour l'OMS, ces résultats sont encourageants mais ils ne doivent pas inciter à prendre un mauvais chemin. "Il est important de garder à l'esprit que de nombreux traitements et vaccins qui se trouvent en stades précoces de développement ont toute une série d'implications éthiques et scientifiques".

"En tant que médecin, essayer un traitement non testé sur des patients est un choix très difficile puisque notre priorité première est de ne pas faire de mal, et nous ne pouvons pas être surs qu'un traitement expérimental ne va pas faire plus de mal que de bien", a expliqué l'OMS. De son côté, Alpha Condé, le président de la Guinée, premier pays frappé par l'épidémie, a appelé à "faire d'Ebola une préoccupation mondiale jusqu'à la production d'un vaccin".