Cette fiche est consacrée essentiellement au lupus érythémateux systémique (ou disséminé), la forme la plus courante de lupus. Le terme « lupus » sera employé dans ce document pour désigner plus simplement cette maladie. Il existe d’autres formes de lupus, dont le lupus discoïde érythémateux (qui peut évoluer en lupus disséminé), le lupus médicamenteux et le lupus néonatal.
Le lupus est une maladie chronique auto-immune, qui survient lorsque le système immunitaire s’attaque aux cellules de l’organisme et les détruit. Il peut toucher de nombreuses parties du corps, dont les articulations, la peau, les reins, le coeur, etc. C’est la raison pour laquelle on parle de lupus disséminé ou « systémique ». Le lupus peut causer des symptômes aussi différents que des poussées de fièvre inexpliquées, des douleurs et un gonflement des articulations, des troubles de la vision et bien d’autres.
Le lupus touche principalement les femmes en âge de procréer, de 15 ans à 40 ans. Les symptômes de la maladie et leur gravité sont très variables d’une personne à l’autre.
Cause
Dans le lupus, pour des raisons qu’on ignore encore - peut-être un ensemble de facteurs environnementaux, hormonaux et génétiques - l’organisme fabrique des anticorps qui s’attaquent à ses propres tissus sains. Le système immunitaire est un réseau complexe d’organes, de tissus, de cellules et de facteurs circulant dans le sang. Habituellement, il protège l’individu contre les maladies. Ces réactions auto-immunes peuvent être très nuisibles pour le corps et occasionnent d’importantes réactions inflammatoires.
Évolution
Le lupus se caractérise par l’alternance de périodes de poussées (avec symptômes) et de périodes de rémission. Durant les poussées, la maladie s’exacerbe : les symptômes s’aggravent et les analyses de sang révèlent la présence d’anticorps anormaux, qui attaquent l’organisme. Puis, les symptômes diminuent peu à peu et disparaissent totalement ou en partie. Les périodes de rémission peuvent durer des semaines, des mois, et même des années. Bien qu’il s’agisse d’une maladie chronique, la plupart des personnes atteintes de lupus ne seront pas malades continuellement pendant toute leur vie.
Éléments déclencheurs
Le stress, le surmenage, l’exposition au soleil et le fait de tomber enceinte ou d’accoucherpeuvent déclencher le lupus par un mécanisme qu’on ignore encore (ce qui ne veut pas dire que ces facteurs en soient la cause). En outre, certains médicaments utilisés pour traiter une autre maladie peuvent déclencher des symptômes de lupus. On parle alors de lupus médicamenteux. Les symptômes disparaissent en général lorsque la personne cesse de prendre le médicament en cause.
Enfin, récemment, plusieurs études ont associé le virus Epstein-Barr au déclenchement de maladies auto-immunes, dont le lupus. Ce virus, extrêmement commun puisqu’il infecte 95 % de la population, pourrait déclencher le lupus chez certaines personnes prédisposées18.
Prévalence
La prévalence du lupus est difficile à estimer. Selon Lupus Canada, près de 50 000 Canadiens souffrent d’une forme ou d’une autre de lupus tandis que Statistique Canada évalue à environ 15 000 le nombre de Canadiens atteints de lupus érythémateux disséminé. Au Québec, des chercheurs ont estimé qu’environ 4 000 personnes étaient atteintes de lupus érythémateux systémique, mais ce nombre pourrait être inférieur à la réalité17. En France, on estime la prévalence à 40 cas pour 100 000 habitants24.
Les symptômes du lupus
Les symptômes varient beaucoup d’une personne à l’autre, puisque la maladie peut toucher à peu près tous les organes et tissus du corps. Habituellement, la maladie se manifeste par quelques-uns des symptômes suivants, qui peuvent apparaître brutalement ou progressivement.
Symptômes non spécifiques
- Une fatigue extrême.
- Une perte de poids inexpliquée et continue ou une prise de poids due à une rétention d’eau
- Des poussées de fièvre inexpliquées.
- Des ganglions enflés.
Symptômes spécifiques
- Des douleurs (arthralgies), une raideur et un gonflement aux articulations. Ce sont les manifestations les plus fréquentes du lupus.
- Une plaque rouge sur le haut des joues et à la racine du nez en forme d’ailes de papillon.
- Une grande sensibilité au soleil, qui se manifeste par des éruptions cutanées rouges qui surviennent sur les régions de la peau exposées au soleil, notamment les mains, la poitrine, les coudes.
- Des plaques en relief, « croûteuses », en forme de disque, peuvent apparaître sur le visage, le cuir chevelu et la poitrine. Elles sont caractéristiques du lupus cutané ou discoïde, qui ne touche que la peau.
- De petites plaies (ulcères) indolores dans la bouche ou les narines.
- Une douleur à la poitrine durant les respirations profondes, et parfois une toux et une difficulté à respirer dues à l’atteinte des poumons.
- Un gonflement des jambes (oedème).
- Si la maladie touche le coeur, elle peut causer une arythmie et plus rarement une insuffisance cardiaque.
- Un état dépressif, de la difficulté à avoir les idées claires et des problèmes de mémoire.
- Des douleurs musculaires.
Autres symptômes
- Une perte de cheveux.
- Des troubles de la vision et une sécheresse des yeux.
- En cas de froid ou de stress : les doigts et les orteils bleuissent ou pâlissent facilement. On parle de maladie de Raynaud.
- De l’urticaire.
- Des maux de tête, des convulsions.
- La formation de caillots de sang dans les vaisseaux sanguins (thrombose).
- Une atteinte des reins, qui ne se manifeste au début par aucun symptôme. Elle peut être détectée entre autres par des analyses d’urine régulières.
- Une anémie, c’est-à-dire une baisse du nombre de globules rouges ou du taux d’hémoglobine dans le sang.
- Une susceptibilité aux infections en raison de l’atteinte du système immunitaire25.
N.B. Certaines formes de lupus (lupus discoïde, lupus érythémateux cutané subaigu) se limitent à des éruptions sur la peau et à une sensibilité au soleil.
Les personnes à risque et les facteurs de risque du Lupus
Personnes à risque
- Les femmes âgées de 15 ans à 40 ans. Dans ce groupe d’âge, le lupus touche approximativement 9 fois plus de femmes que d’hommes. Cette constatation laisse supposer que les hormones féminines jouent un rôle important dans l’apparition du lupus. Même en dehors de ce groupe d’âge, les femmes sont atteintes plus fréquemment que les hommes.
- Les personnes dont un membre de la famille est atteint de lupus ont un risque légèrement accru d’en être atteintes à leur tour.
- Le lupus est plus fréquent dans certains groupes ethniques, notamment chez les Afro-Américains, les Autochtones d’Amérique du Nord et les Asiatiques, probablement en raison d’une plus grande susceptibilité génétique à la maladie.
Facteurs à risque
Certains médicaments pris sur de longues périodes peuvent déclencher un lupus médicamenteux, et les chercheurs pensent que l’exposition à certaines substances, comme les pesticides, lemercure ou la silice, augmente également le risque de développer le lupus18. Par ailleurs, plusieurs études ont montré que le tabagisme actuel ou ancien était associé à un risque accru de lupus22
La prévention du lupus
Comment prévenir
Puisque la cause exacte du lupus reste inconnue, il est impossible de le prévenir.
Mesures pour prévenir le déclenchement et l’exacerbation des symptômes
Protégez-vous du soleil. Les rayons ultraviolets peuvent déclencher une poussée ou aggraver les symptômes présents. L’exposition au soleil entraîne en effet la mort de nombreuses cellules de peau, qui « libèrent » leur contenu, déclenchant ainsi une réaction forte du système immunitaire. Portez des vêtements qui couvrent la peau, un chapeau et des lunettes de soleil lorsque vous êtes à l’extérieur. Sur la peau directement exposée au soleil, utilisez un écran solaire. Il va de soi qu’il vaut mieux éviter le soleil lorsqu’il est à son zénith, c’est-à-dire de 11 h à 16 h.
Consultez votre médecin avant de prendre un médicament. Ne prenez pas de médicament en vente libre sans les recommandations de votre médecin. Certains médicaments peuvent augmenter la sensibilité de la peau au soleil. C’est aussi le cas de médicaments vendus sur ordonnance, en particulier certains antibiotiques. Évitez aussi les produits (incluant les produits naturels) qui stimulent le système immunitaire.
Pendant de nombreuses années, les médecins pensaient que la pilule contraceptiveaugmentait le nombre de poussées chez les femmes atteintes de lupus. Cependant, plusieurs études récentes montrent que la plupart d’entre elles peuvent bénéficier d’une contraception orale sans risque accru23. Les pilules qui contiennent de faibles doses d’oestrogène ou uniquement de la progestérone sont souvent privilégiées, car lesoestrogènes sont susceptibles d’augmenter l’activité de la maladie. Quant au traitement hormonal de la ménopause, il pourrait augmenter le risque de poussée et doit être utilisé très prudemment chez les personnes atteintes de lupus. Parlez-en à votre médecin.
Pratiquez une technique de relaxation. Si l’on considère que le stress peut amplifier les symptômes du lupus, on comprend l'importance d'une bonne gestion du stress comme mesure préventive. Des études ont montré l’utilité de programmes de gestion du stress pour diminuer la douleur et améliorer l’état psychologique des patients atteints de lupus.19 Le tout est de choisir une technique qui vous plaît. Vous pouvez consulter, entre autres, les fiches Méditation, Réponse de relaxation, Training autogène et Biofeedback.
Veillez à bien dormir. Les National Institutes of Health des États-Unis recommandent de profiter de nuits de sommeil d'une durée d'au moins 8 à 10 heures pour aider à minimiser les douleurs causées par le lupus. En effet, la première arme contre les douleurs articulaires serait tout simplement le repos. Il existe plusieurs techniques pour aider à se détendre et favoriser le sommeil (exercices respiratoires, techniques mentales de relaxation, visualisation, méditation, etc.).
Adoptez une alimentation équilibrée. Certaines personnes ont remarqué qu’une mauvaise alimentation contribuait au déclenchement des poussées. Voyez aussi la section Autres approches.
Cessez de fumer. S’il est vrai que fumer est mauvais pour la santé, les personnes atteintes de lupus ont des raisons supplémentaires d’éteindre leur cigarette. D’abord, l’activité de la maladie est plus importante chez les fumeurs que chez les non-fumeurs.20 Ensuite, letabagisme augmente le risque de développer une maladie cardiovasculaire, comme une crise cardiaque ou un accident vasculaire cérébral. Or, les personnes atteintes de lupus sont déjà particulièrement susceptibles d’être atteintes d’une maladie cardiovasculaire. On estime ainsi que le risque cardiovasculaire est 50 fois plus élevé chez les jeunes femmes atteintes de lupus que dans le reste de la population21. On met donc toutes les chances de son côté en ne fumant pas, le lien entre le tabagisme et les troubles cardiovasculaires étant bien démontré.
Faites de l'exercice régulièrement. En plus d’améliorer le bien-être, l’exercice pratiqué régulièrement prévient les poussées de symptômes. En dehors des poussées douloureuses, variez les formes d’exercices pour en tirer le maximum de profit : des étirements pour soulager la raideur des articulations; des poids et haltères pour conserver la force musculaire; et un sport d’endurance (marche rapide, natation, cyclisme) pour redonner de l’énergie et améliorer la santé cardiovasculaire. Voir notre dossier Forme physique.
Protégez vos articulations. Lisez la fiche Arthrite (vue d’ensemble) pour des conseils préventifs antidouleur qui conviennent tout aussi bien aux personnes atteintes de lupus.
Recherchez le soutien social. Parlez de ce que vous vivez à vos proches ou à des gens qui vivent aussi avec le lupus (voir les Groupes de soutien). Cela permet souvent d’adopter une meilleure attitude devant la maladie et de se tenir informé des nouveaux traitements. Le tissu social peut être d’une grande utilité lorsqu’il s’agit de refaire ses réserves d’énergie et d’améliorer son bien-être.
Planifiez bien votre grossesse. Les femmes atteintes de lupus doivent bien choisir le moment de leur grossesse (après une période de rémission de 6 mois idéalement) et obtenir une surveillance médicale étroite au cours de celle-ci. Le lupus augmente le risque de fausse-couche et de naissance prématurée. On sait aussi que les symptômes ont tendance à réapparaître chez les femmes enceintes. Discutez de vos projets de grossesse avec votre médecin.
Mesures pour prévenir les complications
Mesurez votre tension artérielle tous les 3 mois. Des problèmes aux reins se manifestent parfois par une hausse de la pression sanguine. Des analyses de sang et d’urine régulières permettront aussi de s’assurer du bon fonctionnement des reins ou de dépister une atteinte des reins de façon précoce.
Par ailleurs, consultez rapidement votre médecin en cas de fièvre. Les médicaments utilisés pour traiter le lupus peuvent en effet augmenter le risque d’infection.
Les traitements médicaux du lupus
La recherche a permis de grands progrès dans le traitement des symptômes du lupus. Toutefois, il n’existe aucun remède définitif à cette maladie. Les médicaments permettent d’améliorer la qualité de vie en diminuant l’intensité des symptômes, en réduisant le risque de complications et en prolongeant l’espérance de vie.
Idéalement, il faut procéder au traitement du lupus avec le moins de médicaments possible et pour le temps le plus bref, pour calmer les poussées. Certaines personnes n’ont besoin d’aucun médicament, d’autres n’y ont recours qu’au besoin ou pendant de brèves périodes (poussées), mais nombreuses sont celles qui doivent suivre un traitement sur une longue période.
Traitements médicamenteux
Médicaments contre les douleurs (anti-inflammatoires non stéroïdiens). L’acétaminophène (Tylenol®, Atosol®) et les anti-inflammatoires25 en vente libre (ibuprofène, Advil® ou Motrin) peuvent être utilisés pour calmer les douleurs des articulations, lorsque le lupus n’est pas trop grave ou que les poussées ne sont pas trop intenses. Les médecins déconseillent toutefois aux personnes atteintes d’un lupus plus grave de prendre de leur propre chef des antidouleurs en vente libre. Ces médicaments peuvent en effet augmenter le risque de complications du lupus, en particulier l’atteinte des reins. Cela peut prendre un certain temps pour trouver l’anti-inflammatoire qui convient et ajuster la dose avec le médecin.
Corticoïdes. Les corticoïdes, et en particulier la prednisone et la méthylprednisone, sont les anti-inflammatoires les plus efficaces pour traiter le lupus, lorsque la maladie touche plusieurs organes. Employée depuis le début des années 1960 contre le lupus, la prednisone (Deltasone®, Orasone®) est vite devenue un médicament essentiel pour améliorer la qualité de vie des malades. Elle aide à réduire l’inflammation et à contrôler les symptômes, notamment en cas de poussée. Cependant, les corticoïdes pris à fortes doses ou sur une longue période peuvent causer une série d’effets secondaires, dont l’apparition de bleus, de sautes d’humeur, de diabète25-26, de problèmes de vision (cataracte), une hausse de la pression artérielle ainsi qu’une fragilité des os (ostéoporose). La dose est finement ajustée avec le médecin de manière à obtenir le moins d’effets indésirables possible. À court terme, les principaux effets secondaires des corticoïdes sont une prise de poids et un gonflement du visage et du corps (oedèmes). L’usage de suppléments de calcium et de vitamine D contribue à réduire le risque d’ostéoporose.
Crèmes et traitements locaux. Les éruptions cutanées sont parfois traitées par des crèmes, le plus souvent à base de corticoïdes.
Médicaments anti-malariques. L’hydroxychloroquine (Plaquenil®) et la chloroquine (Aralen®) - des médicaments aussi utilisés pour traiter la malaria - sont efficaces pour traiter le lupus lorsque les anti-inflammatoires non stéroïdiens ne suffisent pas. Ils diminuent la douleur et le gonflement des articulations et permettent de traiter les éruptions cutanées. L’un ou l’autre de ces médicaments peut être pris du printemps à l’automne pour prévenir l’apparition des lésions causées par le soleil. L’hydroxychloroquine est aussi utilisée en traitement de fond pour prévenir les rechutes. Les effets secondaires principaux de ces médicaments sont les douleurs d’estomac et les nausées.
Immunosuppresseurs. Les agents immunosuppresseurs permettent de diminuer l’activité du système immunitaire dirigée contre ses propres organes et tissus. Ces médicaments puissants sont utilisés chez une faible proportion de personnes, lorsque la prednisone ne permet pas d'atténuer les symptômes ou lorsqu’elle cause trop d’effets secondaires. Ils sont nécessaires lorsque le lupusaffecte le fonctionnement des reins ou du système nerveux. Les plus fréquemment utilisés sont le cyclophosphamide (Cytoxan®), l’azathioprine (Imuran®) et le mycophénolate mofétil (Cellcept®). Chez certains malades, le méthotrexate (Folex®, Rheumatrex®) peut aussi être utilisé à faible dose comme traitement de fond. Ces médicaments comportent aussi leur lot d’effets indésirables, dont les plus importants sont une plus grande susceptibilité aux infections et un plus haut risque de développer un cancer. Un nouveau médicament, le bélimumab (Benlysta) pourrait être efficace dans certains cas de lupus; ses effets secondaires possibles sont la nausée, la diarrhée et la fièvre25.
Autres
Perfusions d’immunoglobulines. Les préparations d’immunoglobulines (anticorps) sont obtenues à partir de sang de donneurs. Administrées par voie intraveineuse, elles ont une action anti-inflammatoire puisqu’elles neutralisent en partie les auto-anticorps, c’est-à-dire les anticorps anormaux qui se retournent contre l’organisme et sont en cause dans le lupus. Les perfusions d’immunoglobulines sont réservées aux cas de lupus résistants aux autres traitements, comme les corticoïdes.
Références
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