Alcoolisme chronique
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Alcoolisme chronique

Publié par topclinique topclinique   | Il ya 9 ans   | 533

Alcoolisme Pendant longtemps, médecins et grand public ont fait la distinction entre buveurs excessifs occasionnels (par exemple, à l'occasion de sorties entre amis) et gros buveurs quotidiens, autrefois nommés «alcooliques chroniques». Aujourd'hui, les alcoologues (spécialistes des maladies liées à l’alcool) n’utilisent plus ce terme, parce que cette distinction ne se fait plus. En effet, les spécialistes de l'addiction à l'alcool ont pu montrer qu'il existait un continuum entre ces buveurs occasionnels et quotidiens. C'est d'ailleurs tout ce qui fait le danger des troubles de l'alcoolisation : il en faut peu pour faire pencher la balance d'un côté ou de l'autre. Conséquence : bien que les victimes d'alcoolisme chronique ne soient pas les plus nombreuses, toutes les personnes présentant un trouble de l'alcoolisation sont en danger. En effet, s'il existe un risque indéniable pour la santé au-delà de trois verres standard par jour en moyenne (comme ceux servis dans les bars) pour les hommes ou de deux verres quotidiens pour les femmes – soit 21 verres par semaine pour les hommes et 14 pour les femmes - cela ne signifie pas qu'il n'y en a aucun pour une consommation moindre : nous ne sommes pas égaux face à la dépendance, certains étant beaucoup plus vulnérables que d’autres. 

Différence entre alcoolisme chronique et ivresse aigue

C'est la prise de boissons alcoolisées dans un laps de temps très court (une soirée par exemple) qui conduit à une levée des inhibitions avec un sentiment de toute puissance, puis un ralentissement des réflexes avec risque de confusion et de perte d'équilibre, une décompensation psychiatrique chez les buveurs préalablement psychologiquement fragiles, un coma éthylique et au décès en l’absence de réanimation. Cette ivresse peut être ponctuelle et ne plus se reproduire, mais cela n'enlève rien à sa dangerosité : une seule prise peut tuer, soit en conduisant au coma éthylique et au décès, soit en provoquant un accident mortel, le plus souvent un accident de la voie publique ou une noyade.

Symptômes de l’alcoolisation chronique

Il n'y a pas forcément d'ivresses répétées pour donner l'alerte. Parmi ceux qui boivent trop, beaucoup donnent même l’impression de bien le supporter de sorte que leur entourage peut mettre des années avant de s'en apercevoir. Pourtant, durant ce temps, certains signes plus ou moins discrets auraient pu donner l'alerte. En l'occurrence, voici ce que l’on observe chez les buveurs excessifs chroniques :
-  Une tendance à perdre la notion de ce qui est important.
- Une dépression fréquente : comme ils ont moins de projets, moins de centres d’intérêt, moins de plaisir à faire ce qu’ils aimaient autrefois, une dépression peut apparaître.
- La violence peut également entrer dans leur quotidien : d’abord verbalement, puis physiquement envers le conjoint et les enfants (caractère irascible).
- Des pertes d’équilibre et des troubles moteurs peuvent survenir en cas d’atteinte du cervelet et des nerfs.
- Une atteinte du foie jusqu’à la cirrhose parfois.
- Une jaunisse (ictère) en cas d’atteinte importante du foie,
- Des troubles digestifs.
- Une atteinte du pancréas qui peut aussi être touché (pancréatite chronique), d’où l’apparition de douleurs abdominales et parfois de vomissements …
- Des troubles psychiatriques chroniques.

La particularité de l'alcoolisme au féminin

Entre 20 et 79 ans, environ une femme sur dix déclare consommer de l’alcool tous les jours et environ 4 sur 10, toutes les semaines. Il existe des différences sur le plan social avec les consommateurs excessifs masculins : alors que ces derniers sont plus nombreux dans les classes socioprofessionnelles défavorisées et qu'ils peuvent attaquer l’alcool dès le matin au bar, les femmes concernées occupent volontiers des postes à responsabilités et boivent seule, pour noyer leur stress. Autre différence notoire : si le mariage est plutôt un facteur de protection pour l’homme, il n’en est rien chez la femme. 

Sur le plan médical, les risques encourus - cirrhose hépatique, hypertension artérielle, cardiomyopathie et hémorragies gastro-intestinales – sont majorés chez les femmes, sans oublier les risques de fausses couches et de syndrome d’alcoolisation fœtale en cas de grossesse. Heureusement, les femmes dépendantes à l’alcool semblent plutôt motivées pour se sevrer (notamment pour ne plus être stigmatisées et ne pas perdre leurs enfants) et lorsque leur prise en charge thérapeutique est adaptée, avec une prise en charge des autres addictions, des troubles du comportement alimentaire, de l'anxiété, de la dépression, etc., leurs chances de succès sont bonnes.

Zéro alcool pendant la grossesse

Le seul message acceptable, c’est zéro alcool pendant la grossesse … et même si possible dès le désir de grossesse, car beaucoup de femmes n’apprennent qu’elles sont enceintes que lors du 2ème ou du 3ème mois. Pourquoi ? Parce qu'il est impossible de donner un seuil maximal acceptable en dessous duquel il n'y a strictement aucun risque à consommer de l'alcool. En effet, ce seuil est variable d'une femme à l'autre : il peut dépendre du patrimoine génétique, du poids, du stade de la grossesse, etc. 

Si l'on manque de certitudes pour les faibles consommations, les consommations quotidiennes moyennes ou élevées sont déjà mieux étayées : ainsi, une consommation journalière de 2 à 5 verres d’alcool pendant la grossesse peut entrainer un retard de croissance de l’enfant à naître, ainsi qu'une atteinte cérébrale. Au-delà de cinq verres, le risque de syndrome alcoolique fœtal (SAF) avec troubles majeurs du comportement et retard intellectuel, est bien réel. L’alcool est ainsi la première cause de trouble mental non génétique chez l’enfant ! En outre, une exposition précoce à l’alcool in utéro est un facteur prédictif d’addiction future à l’alcool et donc, de risques pour l'enfant à naître de rencontrer lui-même plus tard, des troubles de l’alcoolisation.

Les conséquences sociales de l'alcoolisation chronique

Une personne sous l’emprise de l’alcool a des sautes d’humeur et ne contrôle plus sa force. C’est pourquoi leurs proches sont trop souvent confrontés à la violence verbale ou physique (femmes battues, violences sociales, etc.). S'y ajoutent les nombreux morts et blessés dans le cadre des 40 % d’accidents de la route liés à la conduite en état d’ivresse de l’un des conducteurs responsables de l’accident. La transmission des infections sexuellement transmissibles est aussi augmentée (oubli du préservatif sous l’emprise de l’alcool).
Au moins un tiers des affaires délictuelles et criminelles seraient liées de près ou de loin à l’alcool. Le coût de l’alcool pour la société est estimé à plus de 17 milliards par an si l’on y inclut les problèmes de santé, ainsi que les coûts indirects inhérents aux journées de travail perdues, aux accidents de travail, à la souffrance psychologique des proches (violences conjugales), etc. : or en comparaison, les taxes liées à l’alcool ne «rapportent» que 1,5 milliards d’euros chaque année.

Quand et qui consulter pour l'alcoolisation chronique ?

Toute la difficulté est de prendre conscience de son problème d'alcool, or beaucoup sont dans le déni ou la sous-estimation. Pour les spécialistes de l'addiction à l'alcool, il est donc important de faire un point avec son médecin traitant en lui déclarant (sans mentir car il n'est pas là pour juger), le nombre de verres d'alcool bus par semaine, à quelle fréquence, dans quelles circonstances. Il faut le faire au même titre que l'on parle de sa consommation de cigarettes, car une intervention, lorsqu'elle est nécessaire, est d’autant plus efficace qu’elle a été précoce. Il n'y aurait que 8 % des personnes ayant un problème avec l’alcool, qui seraient actuellement prises en charge (souvent les cas extrêmes), ce qui est évidemment trop peu ! Pourtant, le médecin traitant n’a aucun mal à faire le diagnostic. Le bilan repose sur une prise de sang : elle permet d’en savoir plus sur l’état du foie (un organe particulièrement sensible à l’alcool), éventuellement du pancréas et surtout, sur l’ancienneté de l’alcoolisation. Après plusieurs années passées à boire, divers paramètres sont altérés, qui ne laissent guère de place au doute pour le médecin. Une échographie du foie et du pancréas peut également être utile. Une biopsie hépatique à des fins d’analyse est enfin demandée en cas de suspicion d'une cirrhose alcoolique. 

Prévention de la dépendance à l'alcool

Arrêter une consommation excessive d’alcool quand on n’est pas dépendant (ni psychique, ni physique) est simple. Souvent, le simple fait d'en parler avec le médecin traitant suffit. En effet, il n’y a pas besoin de viser systématiquement l’abstinence comme on le pensait autrefois. Le simple fait de diminuer sa consommation a des conséquences très positives sur sa santé, mais pour faire cette démarche, encore faut-il se rendre compte que l’on boit trop ! 

La prévention des rechutes de l'alcoolisme chronique

Comme pour le sevrage tabagique il peut y avoir des rechutes. Ne pas y arriver du premier coup ne veut pas dire que l'on n'y arrivera jamais, mais plutôt que si l'on a réussi à tenir plusieurs jours, semaines ou mois «sans alcool», c'est déjà un bon début. On apprend à connaître ce qui a fait rechuter et le prochain sevrage aura plus de chances de réussir. Il faut donc garder le courage et la motivation avec l’idée d’abandonner l’alcool. De plus, pour augmenter ses chances de ne plus succomber à l’alcool, des solutions existent comme se faire suivre par son médecin traitant ou un spécialiste de l'addiction et pourquoi pas s’inscrire dans un mouvement d’anciens buveurs. 

Le médecin peut prescrire une aide médicamenteuse au maintien du sevrage :
- Les traitements déjà anciens comme l’acamprosate ou la naltrexone,
- Un traitement plus nouveau, le baclofène permet à certains de réduire la consommation sans en ressentir le manque et donc, de retrouver une vie sociale et professionnelle.
- Un anticonvulsivant semble favoriser la réduction de la consommation,
- Un modulateur des récepteurs aux opioïdes agissant sur la structure cérébrale de la récompense, rendant moins pressante la soif d’alcool, etc.

Et la recherche se poursuit du côté de la stimulation magnétique transcrânienne consistant à stimuler des cellules cérébrales via un champ magnétique.

sources et sites d'intérêt

• Alcool Info Service, réalisé par l’Institut National de Prévention et d’Education pour la Santé : www.alcoolinfoservice.fr.

• Mission Interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives : www.drogues.gouv.fr.

• Société Française d'Alcoologie (SFA) : www.sfalcoologie.asso.fr/

• A lire : «Non ! J'ai arrêté. Trouver un chemin de sortie face à l'alcool … » par Laurence Cottet, InterEditions, 2014.