Année 2016 : les faits marquants (épisode 1)
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Année 2016 : les faits marquants (épisode 1)

Publié par topclinique topclinique   | Il ya 9 ans   | 582

Biotrial : accident tragique dans un essai chez des volontaires sains

L'année 2016 aura été marquée par la dramatique affaire Biotrial et ses multiples zones d'ombre. Mi-janvier, c'est le choc lorsque la Ministre de la santé, Marisol Touraine révèle que, soumis à un essai clinique de phase 1, 6 volontaires sains sur 8 sont hospitalisés au centre hospitalier universitaire de Rennes. L'incident prend un tournant tragique quand on apprend que l'un des volontaires est décédé et que trois autres patients présentent un « tableau sévère, qui fait craindre un handicap irréversible ». Que s'est-il passé ? Pourquoi des volontaires sains ont-ils été victimes de lésions neurologiques dont certaines mortelles ? Plusieurs enquêtes sont lancées en parallèle : une en flagrance de la police judiciaire, celle de l'Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé (ANSM) et celle de l'Inspection Générale des Affaires Sociales (IGAS), saisie par la ministre de la Santé. Très vite, l'ANSM, qui a autorisé l'essai, est dédouanée mais les causes restent à trouver. Des hypothèses émergent : après la fausse piste des substances psychoactivesune toxicité « off-target » de la molécule – évoquée précocement sur notre site – apparait comme la cause la plus probable de l'accident. Très vite aussi, de nombreuses questions apparaissent – sans trouver d'ailleurs de réponses satisfaisantes –, tant sur la nature de la molécule testée (un inhibiteur impliqué dans la dégradation des endocannabinoïdes), que sur le protocole et la gestion de crise.

En avril, dans le rapport remis par le Comité Scientifique Spécialisé Temporaire (CSST) d'experts nommés fin janvier par l'ANSM pour examiner les causes pharmacologiques et toxicologiques de l'accident, aucune responsabilité n'est évoquée, mais les propositions du rapport dessinent en creux les failles de cet essai dramatique. Le Figaro, de son côté, mène une enquête parallèle et relève un certain nombre de manquements dans le protocole et d'alertes – notamment sur la toxicité neurologique du produit testé – non suivies d'effet. En octobre dernier, nouveau rebondissement, le Figaro et Mediapart révèlent que l'ANSM aurait falsifié un rapport afin de se dédouaner, accusations que l'ANSM a aussitôt démenti niant « catégoriquement avoir caché quelque information, document ou rapport, relatifs à l'instruction du dossier, tant à l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) qu'aux autorités judiciaires ».

Reste au final l'impression d'une affaire « étouffée » où les responsabilités ont été diluées, voire évacuées, et qui n'est pas sans rappeler le scandale du Médiator. Un sentiment partagé par l'épidémiologiste et biostatisticienne Catherine Hill qui est revenue sur toutes les questions restées sans réponse et qui conclut ainsi son analyse : « après le Médiator, rien n'a changé à l'agence [ANSM, ndlr]. Ils n'ont pas cherché à comprendre ce qui n'allait pas. L'affaire de Biotrial à Rennes est un exemple tragique de ce qui ne fonctionne pas ».